Mondial du Qatar : Une finale épique à sens unique ( Par Moïse Sidibé)

Choc des civilisations : Bizarre que ce Mondial de football, évènement qui réunit toutes les cultures, fût organisé dans une monarchie conservatrice et jalouse de sa tradition. Le choc a été évité tant bien que mal. Pas de brassard arc-en-ciel pour soutenir les LGBT, pas d’alcool (quel manque à gagner pour la FIFA ?). Et si Gianni Infantino a plus que consenti, disant que sans alcool ne tue pas, et en dépit de la main sur la bouche en signe de protestation de l’interdiction du brassard LGBT de l’équipe allemande (éliminée aussitôt), allant jusqu’à monter le scénario de la marche de clown de Messi avec la coupe devant ses coéquipiers, en dehors de tout autre considération, le tournoi s’est déroulé et terminé dans un décor féérique. Même ceux qui avaient crié au boycott ont été émerveillés lors de la finale. On peut supposer que beaucoup d’Africains soutenaient l’Argentine, pas seulement à cause de Messi, mais parce que la France a pompé sans retenue leurs talents pour tenter de faire « le geai paré des plumes du paon ». Et si on entend qu’il n’y avait que 6 mille supporters français contre 50 mille Argentins à Doha, cela signifie quelque chose. 

Sur le plan footballistique : le football n’est plus l’apanage des pays du Nord, le nivellement est rapide et sensible avec les progrès prodigieux des équipes d’Asie et d’Afrique, le Japon qui bat la Manschaft, le Cameroun qui bat le Brésil, quoique, et cet étonnant Maroc, qui n’est pas un foudre de guerre en Afrique, mais qui fait tomber le deuxième du classement FIFA (très aléatoire) et tous les autres grands prétendants dont le champion du monde de 2010, ouvrant ainsi désormais la voie à tout le continent. En tiraillant, malmenant jusqu’au dernier retranchement le finaliste malheureux en demi-finale. Malgré leur banc mieux fourni que quiconque, c’est à bout de souffle que les Coqs bleus ont baissé la tête dans la finale la plus longue de leur histoire, une finale épique en cinq mi-temps pleine de rebondissements dans un décor féérique pour l’entrée forcée de Messi dans la légende. 

 A la recherche d’un triplé à deux et quasiment sur un pied d’égalité, la France est venue dans un 4-4-2 défensif et circonspect face à l’Argentine dans un 4-3-3 ouvert, c’est l’Argentine qui s’est montrée plus offensive, plus agressive et plus virile sur l’homme pour prendre les commandes du milieu du terrain. Di Maria, dont le contrat n’a pas été renouvelé au PSG des Qatariens, a fait tout un festival sur le côté droit de la défense française et obligé Dembélé de venir suppléer Hernandez sur le côté droit, mais Ousmane Dembélé n’est pas défensif, cela a empêché les Français de créer le surnombre en attaque. Premier trou.

 A ce jeu, Dembélé a fait la faute sur Di Maria. Pénalty à la 21ème minute transformé par Messi.

Dominés physiquement et tactiquement au milieu du terrain, les côtés gauche et droit bouclés, les Français encaissent un deuxième but de ce même Di Maria à la 35ème minute.

 C’est alors que les changements les plus curieux interviennent dans les deux camps : Giroud excellent en jeu aérien, qui sait défendre dans les corners comme dans les coups de pied arrêtés, qui est un danger permanent pour la défense adverse, est remplacé au moment où il fixait les défenseurs argentins pour les empêcher de monter à l’offensive. De l’autre côté, Di Maria, le principal animateur offensif argentin, est aussi remplacé par Acunia, qui a peu apporté au jeu. 

Certains changements ont été bénéfiques aux Bleus. A la 78ème minute, M’Bappé frappe sur une main argentine pénalty, le même M’Bappé le transforme pour la réduction 2-1. Ce fut le réveil général dans le camp français, et 3 minutes plus tard, à la 81ème minute, sur une balle récupérée par Koman à Messi, M’Bappé égalise : 2-2. C’était la folie. Emmanuel Macron se lève et applaudit à la tribune. Il devait penser au père Noël, à ce moment, comme tout autre.

Prolongations : A la 108ème minute Messi marque pour le 3-2 et pénalty pour l’Argentine. A la 116ème minute encore pénalty logique pour la France. M’Bappé prend courageusement la responsabilité et marque pour le 3-3.

 Les chiffres parlent d’eux-mêmes pour les deux pays à la convoitise d’un triplé au Mondial. 2 buts pour les Argentins en première mi-temps, 2 buts pour les Français en deuxième mi-temps et 1-1 pendant les prolongations. Egalité parfaite pendant les 120 minutes. Les tirs au but seront en faveur de Messi, qui marquera au total 3 buts dont un au tir au but. M’Bappé a porté tout seul son équipe en marquant tous les 4 buts, dont 3 pénaltys.

 Logiquement il devait avoir le ballon d’or de ce Mondial, mais les organisateurs ont décidé que c’est à Messi qu’il revient pour sa dernière participation à un Mondial. 

Il est difficile de ne pas poser une question : Etait-ce une récompense pour l’ensemble de sa carrière, ou c’est par mérite dans ce Mondial ? Entre Messi et M’Bappé, qui a marqué le plus, qui a été le plus grand lors de cette finale ? Mais si c’est parce que Messi s’en va qu’on lui a décerné ce ballon d’or, ce n’est pas objectivement irrationnel. Mais encore, si jamais Messi changeait d’avis pour revenir prochainement sous la pression des milliers de supporters argentins, et que Luka Modric ne raccroche pas à 37 ans, qu’en dira-t-on ?

Enfin, depuis 2008, Lionel Messi a marqué plus que quiconque le football dans le monde. Il faut se faire violence pour critiquer ce sacre de ce sacré Messi, mais à la recherche de l’équité et à la chasse à l’iniquité en tous points de vue, il faut dire ce qui vient d’être dit. 

 

Avec ses 7 ballons d’or ordinaires et le ballon d’or mitigé de Mondial du Qatar, Messi a fait pratiquement un peu plus que Maradona, et le roi Pelé. Aucun n’a accumulé autant de trophées et de ballons d’or, Maradona a plus d’élégance et d’allure physique de footballeur que tous.

Maintenant que toutes ces légendes ont atteint l’empyrée de leur football, laquelle est le meilleur joueur de tous les temps, pour l’instant ? 

On pose bêtement ainsi cette question parce que M’Bappé, « la hyène de terrain », a son avenir prometteur devant lui, il a au moins encore trois autres coupes du monde pour battre tous les records, s’il ne se monte pas trop le bourrichon comme…

En 1999, la FIFA était à la recherche du meilleur footballeur du siècle. La question fut mise en délibéré à toutes les presses sportives du monde. Il fallait compter avec le chauvinisme, le propre de l’Homme : Tous les Brésiliens avaient désigné Pelé, tous les Allemands avaient désigné Beckenbauer, tous les Français avaient désigné Platini, tous les Hollandais, Johan Cruiff. Les Guinéens étaient derrière le doyen Pathé Diallo pour désigner Pelé, mais Pathé Diallo n’est pas la rationalité faite homme, il était dans l’âme brésilien et prêt à mordre quiconque soutenait le contraire de ses opinions. Ce fut le premier sujet de discorde entre nous. On lui a fait un écrit dans un journal : « celui qui réussit un exploit de l’antiquité au temps moderne est meilleur à celui-là qui l’a réussi dans l’antiquité puisque le football était rudimentaire, archaïque. Actuellement il s’est modernisé et professionnalisé, le football est devenu une science. Marquer un but actuellement est plus laborieux, il faut plus de technique et de talent. Pelé était incontestablement au-dessus des joueurs de son temps, Maradona était aussi au-dessus des joueurs de son temps. Sa longue chevauchée lors du match Argentine-Angleterre en 2006 était inédite dans les annales du football, et il a marqué de son empreinte le Mondial du Mexique 1986 en le faisant gagner à lui tout seul.

Pathé n’était pas d’accord. Mais dernièrement, vu la contestation de voir Pelé désigné comme le meilleur du siècle passé, la FIFA a organisé une autre consultation populaire sur internet. C’est Maradona qui l’avait remporté devant le roi Pelé. C’était pour donner raison à tous ceux qui avaient désigné Maradona. Mais aussi, on tient compte de deux avis, non des moindres, celui de Roberto Baggio et de Zinédine Zidane, qui ont désigné Maradona. 

Lors du quart de finale de la coupe du monde d’Italie qui opposait l’Italie à l’Argentine en 1990, Baggio était capitaine de l’Italie, à une question de la presse française sur son pronostic, Baggio avait dit que l’Italie est favorite, qu’elle est sur son sol, mais il ne faut pas oublier que dans l’autre camp il y a Maradona, c’est le plus fort du monde… Objectif, ce Baggio.

Le problème du ballon d’or de ce Mondial du Qatar reste en délibération prochainement pour infirmer la clairvoyance ou l’impartialité de la FIFA…

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