Intégration sous-régionale : la CEDEAO joue-t-elle son va-tout ?

Est-ce le déclin en vue d’un bloc sous-régional, politique et économique ? Pourquoi la CEDEAO est-elle parfois incapable de faire face aux crises de son espace ? Faut-il s’attendre à la création d’un autre bloc dans la zone ouest-africaine ? Ce sont entre autres questions que se posent beaucoup d’acteurs face à la montée des crises sociopolitiques et économiques dans la zone CEDEAO.

Fille de l’union douanière (1959), la CEDEAO a vu jour le 28 mai 1975, et devrait, à l’origine, promouvoir la coopération et l’intégration avec l’objectif de créer une union économique et monétaire ouest-africaine. Mais avec moults crises sociopolitiques dans son espace, l’institution sous-régionale élargit ses actions au maintien de la stabilité en 1990. De nos jours, elle est secouée par des crises qui entravent son développement et la réalisation de plusieurs de ses objectifs. Pour certains analystes, la CEDEAO actuelle serait dépassée. Il faut donc une révolution stratégique pour une nouvelle organisation. C’est l’avis de Dr Alhassane Makanéra Kaké, juriste et spécialiste en finances publiques. 

« La CEDEAO est entrain de gérer des crises auxquelles elle ne s’est nullement préparée. Ça c’est premier élément. Deuxièmement, la CEDEAO, est restée au niveau des Présidents de la République. C’est en fait, une institution des Chefs d’Etat. Ce qui fait que quand on interdit des coups, on se limite juste aux coups d’Etat militaires. On ne va pas aller jusqu’à vérifier quelqu’un qui triche les élections, qui tripote les élections et qui se fait élire. On considère pas ça comme un coup d’Etat. Finalement, la CEDEAO est devenue un syndicat des Chefs d’État pour se maintenir au pouvoir. Cela est une situation contre nature. Ça tient pour un moment donné, mais à long terme, ça ne tient pas. Pour preuve, avec la crise au Mali, je viens de publier un article sur le net. J’ai dit bientôt, il y aura deux CEDEAO dont une pour ceux qui prennent les armes pour prendre le pouvoir. Et je l’ai signalé, il y a 5 mois de cela, et ça commence à se dessiner avec le retrait de 3 pays membres de la CEDEAO », dit-il. 

 Que peut faire la CEDEAO ? 

Répondant à cette question , Dr Kaké affirme : «Premier élément, c’est une réforme nécessaire et indispensable. Le second, c’est sur deux palettes. Il faut que la CEDEAO ait la capacité de s’autofinancer. Mais si vous regardez, même l’Union africaine, 91% de son budget viennent de l’extérieur. Qu’est-ce que vous pouvez faire avec 9%. C’est pourquoi, si on peut s’associer, on a les moyens, on s’associe. Et si les moyens ne sont pas là, on réduit nos ambitions. Mais il ne faut pas dire: je suis CEDEAO, alors que tu ne finances même pas 10% de ton budget. Tu vas faire quoi ? Donc il faut une nouvelle organisation, qui doit tenir compte non seulement de la décolonisation politique, ça c’est passé, mais la gestion politique à l’intérieur de la Communauté. Une nouvelle CEDEAO qui va aussi trouver les moyens nécessaires pour ça, y compris les moyens militaires. Et d’ailleurs, pourquoi ne pas avoir une commission CEDEAO des élections ? Cela veut dire que si la Guinée ou le Burkina veut organiser les élections, c’est la CEDEAO qui vient organiser et proclamer les résultats. Mais quand les gens parlent, on évoque le principe de souveraineté. Mais la souveraineté, c’est pour le peuple. Et donc il faut une nouvelle organisation, qui va lutter contre la mal gouvernance, la corruption et les élections truquées.. mais malheureusement, la CEDEAO est dépassée pour lutter contre ces trois facteurs et les affaires de notre espace. Parce que, n’oubliez pas, cette institution, à l’origine, était purement à vocation économique, pour faciliter la fluidité économique et la circulation des personnes et leurs biens. D’où la nécessité de la création d’une nouvelle structure. »

Gassime Fofana

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