Alhassane Camara: « Le budget de la préfecture de Forécariah ne fait pas … »

Cela fera bientôt une année depuis qu’il est à la tête de la préfecture de Forécariah. Alhassane Camara nous a reçus pour parler de son bilan, de la reprise des activités après le passage de l’épidémie à virus Ebola et des perspectives pour le port de Benty. Interview 

ledeclic.info: comment concevez-vous votre mission?

Etre préfet, c’est avant tout être sur le terrain. En tant que représentant de l’Etat, je dois donner une bonne image à la préfecture et impulser son développement sur tous les plans.  Donc toutes les activités de développement font partie de mes préoccupations. Mais je m’en tiens à la réalité et la réalité aujourd’hui à Forécariah c’est le travail de la terre; c’est le développement de l’agriculture qui constitue notre premier espoir. Voilà ce à quoi je m’attelle aussi. 

La décision vous nommant a été prise il y a bientôt une année. Comment votre nomination a-t-elle été accueillie par les populations de Forécariah ?

Je dirais que la population était mieux placée pour répondre à cette question. Mais puisque vous me le demandez, Je voudrais vous assurer qu’à Forécariah, jamais la nomination d’un préfet n’a suscité autant d’engouement au niveau des citoyens comme cela a été mon cas. J’étais nommé pour assurer l’intérim, mais l’accueil que la population a fait de cette fonction intérimaire a suffi pour convaincre les autorités effectivement que je suis quelqu’un qui s’y connait, quelqu’un qui est avec la population et qui est apprécié d’elle. C’est  ce qui a fait, sans doute, que j’ai été confirmé à ce poste.

Quelques mois après cette confirmation, quelle est aujourd’hui votre relation avec la population ?

C’est une bonne relation marquée par l’entraide et la complémentarité parce qu’un seul individu n’est rien par rapport à une société. On m’accepté malgré quelques défauts inhérents à tout individu. De toute façon, la population a compris qu’elle peut me laisser évoluer et m’accompagner.  Et c’est ce qui se passe depuis ma nomination.

Vous étiez nommé suite à la « défaillance » de l’ancien préfet.  Aujourd’hui qu’est-ce qu’on peut retenir de votre bilan ?

C’est vous qui parlez de défaillance de mon prédécesseur. Pour ma part, je dirais que c’est pour des nécessités de services. C’est ce que j’ai compris. Certes j’étais nommé suite à certains problèmes liés à la conservation et à la protection de l’environnement. Alors ma première activité a été la sensibilisation de la population par rapport à la protection de l’environnement en lui expliquant les dangers que nous courons avec la dégradation massive de nos forêts et aussi des sites miniers qui nous entourent. J’ai tenu des meetings d’information et de sensibilisation dans chacune des collectivités relevant de ma juridiction. Ensuite, après ma confirmation, j’ai renforcé les mêmes messages, cette fois-ci avec les services déconcentrés sans occulter les services de sécurité et de protection de l’environnement. Il était donc question de limiter les dégâts parce qu’on ne peut pas interdire complètement la coupe du bois. Il y a des infrastructures de base comme les établissements scolaires, les postes de santé, il faut le bois pour le toit et autres. Ma deuxième action a été aussi de contribuer, par un suivi régulier, à la réalisation de certaines écoles octroyées par le Programme d’appui aux collectivités villageoises (PACV). Les infrastructures qui étaient en souffrance ont été achevées et aujourd’hui elles sont fonctionnelles. Nous avons accompli ces activités avec nos maigres moyens. Il faut préciser que Forécariah est une préfecture de type C. Le budget de la préfecture ne fait pas le budget de certaines sous-préfectures ailleurs.  Qu’à cela ne tienne, en fonction du minimum que nous avons, on est parvenus à  entretenir certaines de nos pistes rurales.

 Forécariah avait été également frappé de plein fouet par l’épidémie à virus Ebola. Cela a eu des répercussions tant sur le plan économique et  que social. Après la fin de la maladie, comment vivent aujourd’hui les populations de votre préfecture ?

Ebola est passé, mais nous a laissé de tristes souvenirs. Nous avons perdu beaucoup de nos concitoyens, nos traditions ont été affectées, l’économie a été profondément touchée, les activités commerciales et agricoles ont été anéanties et le tissu social a été entamé.  Après cette parenthèse malheureuse, c’est maintenant l’heure de la reprise et du renforcement des activités qui a sonné. C’est le lieu de remercier le gouvernement et ses partenaires qui nous ont aidés à vaincre cette épidémie. De nos jours, c’est le même gouvernement qui est en train de nous appuyer à travers les partenaires en nous apportant des vivres pour les orphelins de l’épidémie. Par ailleurs, l’économie est touchée comme je l’ai dit tantôt. La société minière FGM qui était là et qui avait commencé même l’exploitation a quitté et ce départ n’a fait que compliquer la situation économique dans la préfecture. Il en est de même pour Rio Tinto dont le départ a plongé  les travailleurs dans la colère et les familles dans l’incertitude. Le problème de l’emploi se pose également. Le chômage a poussé certains vers le banditisme. Même avec les services de sécurité, on avait du mal à maîtriser cette population, mais aujourd’hui ça commence à aller car l’espoir est encore permis quant à la réhabilitation de ces zones minières et la reprise du commerce entre Freetown et Conakry. Le seul problème désormais, c’est l’état des routes qui lient les deux capitales.

 Vous avez parlé de ces sociétés minières qui évoluaient à Forécariah. Comment évaluez-vous aujourd’hui leur impact sur la vie des populations ?

La société minière FGM s’est acquittée de sa taxe superficielle allouée aux localités qui l’abritaient à savoir Moussayah par rapport au site même des mines et Farmoriah à travers son port de Conta. Nombreux sont les jeunes qui avaient trouvé de l’emploi ; la piste rurale qui relie Forécariah centre au chef-lieu des sous-préfectures de Moussayah et Sikhourou a été entretenue. C’est également à partir de cette taxe qu’on a pu réaliser certaines infrastructures comme le marché de Pamelap et de Moussayah. La prise en charge des enseignants pour les enfants de certaines localités ainsi que la réalisation des forages ont été facilitées grâce à cet apport financier.

Un autre sujet qui focalise les attentions ici, c’est bien le projet du port de Benty. C’est l’un des ports les plus profonds et dont l’aménagement annoncé avait suscité beaucoup d’espoir. Pourquoi jusqu’ici ce projet ne se concrétise pas?

Il ne s’est pas concrétisé pour plusieurs raisons. D’abord par manque de moyens. La préfecture n’a pas les moyens nécessaires pour faire face à ce projet. Nous avons besoin d’investisseurs étrangers pour des infrastructures portières et cela n’est possible qu’avec l’appui total du gouvernement. Nous avons reçu deux ou trois  groupes  de chinois qui sont venus faire des visites de terrain. Mais avec Ebola toutes les démarches qui ont été entreprises ont été suspendues.  Ensuite pour concrétiser la réalisation du port de Benty, il faut du temps.  Nous donnons donc tu temps au temps de nous faire voir tout ce qu’on a entendu et lu par rapport à la réhabilitation de ces infrastructures portières.

Quels sont désormais les projets en vue pour ce port ?

Il y a sûremet des perspectives qui sont en cours, mais c’est du côté de l’Etat. La préfecture n’a pas de possibilités pour réaliser le port de Benty. Il ne faut pas se ne mentir. Nous sommes plus au temps des mensonges.

Interview réalisée par Gassime Fofana

 

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